Si vous allez en Kabylie, vous devez savoir certaines choses pour ne pas vous retrouver dépassé, car cette partie de l’Algérie est différente du reste du pays en termes de géographie, d’histoire, de langue, de traditions, de cuisine … etc.
Voici donc 10 choses à savoir si vous allez en Kabylie :
1. L’histoire de la Kabylie
Tout d’abord, il faut se plonger dans l’histoire de cette région pour comprendre ses spécificités. Voici quelques points qui offrent un aperçu général de l’histoire de la Kabylie :
- Au cours des 20 000 dernières années, la Kabylie, peuplée d’une communauté dynamique et pacifique, a inscrit la Liberté comme le principe sacré guidant son existence.
- Témoin de nombreuses invasions, la région a accueilli les Phéniciens vers 1000 avant J.-C, initialement en tant que commerçants, établissant des liens avec les royaumes numides avant que les Romains ne viennent perturber l’équilibre. Les Kabyles, fidèles à leur résistance ancestrale, ont lutté contre le colonialisme romain aux côtés des autres Berbères.
- Au fil des siècles, la Kabylie a été le théâtre de multiples invasions, chacune laissant une empreinte singulière sur cette terre. Les Vandales, les Byzantins, les Arabes, les Espagnols, les Turcs, et enfin les Français ont tous contribué à façonner l’histoire de cette région digne et résiliente.
- Islamisés, certains Kabyles ont activement contribué à la création de dynasties musulmanes, jouant un rôle clé dans l’établissement de la dynastie fatimide qui a fondé Le Caire en 969.
- En 1518, lors de la prise d’Alger par les Turcs, ces derniers échouent à soumettre cette région rebelle. Quant aux Français, ce n’est qu’en 1872 qu’ils parviennent à vaincre la résistance farouche des Kabyles.
- Lors de la guerre d’Algérie, la kabylie s’est distinguée comme l’un des principaux bastions de la lutte pour la liberté, demeurant un défenseur inébranlable de ses valeurs, de sa langue et de sa culture.
- Aujourd’hui encore, la Kabylie perpétue sa quête incessante pour préserver son héritage ancestral.
2. La langue kabyle
La première chose que vous remarquerez en entrant en Kabylie est la langue parlée, qui n’est pas la même que dans le reste du pays. En effet, l’une des principales singularités de cette région est qu’elle possède sa propre langue, le kabyle.
- Le kabyle est une langue berbère parlée en Kabylie. Elle compte environ 6 millions de locuteurs dans le monde dont 3,5 en Kabylie et le reste dans différentes régions comme la capitale Alger, ou d’autres pays comme la France et le Canada.
- Comme toutes les autres langues berbères, le kabyle fait partie de la famille des langues chamito-sémitiques.
- Le kabyle est la langue berbère la plus parlée en Algérie, et elle est classée deuxième dans toute l’Afrique du Nord après le Chleuh ou tachelhit, une autre langue berbère parlée au Maroc.
- Comme toutes les langues berbères, le kabyle utilise l’écriture Tifinagh. Mais vers 1945-1950, le kabyle adopte l’écrit à base latine qui prend sa place dans le cadre institutionnel et dans les écoles.
- En 2002, suite à un long combat pour la reconnaissance de la langue Kabyle, elle est devenue deuxième langue nationale, puis langue officielle en Algérie en 2016.
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3. Les traditions typiques de la Kabylie
Parmi les nombreuses traditions typiques de la Kabylie, on peut citer :
- Timechret : Timechret, aussi appelée Lewzia, est une tradition ancienne en Kabylie. On sacrifie des bovins et on partage la viande entre les habitants du village pour renforcer la solidarité. Cela se fait pendant les fêtes religieuses ou des événements importants.
- Anzar : Anzar est une vieille coutume en Kabylie et dans d’autres régions du pays. C’est un rituel pour demander de l’aide à la nature pendant les périodes de sécheresse.
- Le pèlerinage annuel d’Aẓru n Ṭhuṛ : Chaque année en août, le pèlerinage d’Aẓru n Ṭhuṛ rassemble hommes, femmes et enfants. Ils montent jusqu’au Rocher de l’aube (Aẓru n Ṭhuṛ) sur le mont Djurdjura. Cette tradition a une histoire très ancienne.
4. Emblèmes et symboles Kabyles
Les Kabyles sont un peuple fier de leurs origines et traditions. C’est pourquoi la Kabylie est connue par ses nombreux symboles aux significations diverses.
Voici les principaux symboles associés à l’histoire et à la culture Kabyle :
- Le drapeau : Les Kabyles se retrouvent dans le drapeau adopté par le CMA en 1997 aux Îles Canaries. Créé dans les années 70 par l’Académie berbère à Paris, ce drapeau a trois bandes horizontales : le bleu pour la mer, le vert pour les montagnes, et le jaune pour le Sahara. Au milieu, la lettre ⵣ, appelée yaz, du Tifinagh, représente « l’homme libre ».
- ⵣ : La lettre ⵣ, yaz, fait partie de l’alphabet amazigh (tifinagh) et symbolise la consonne /z/. Au départ utilisée comme symbole des régions amazigh des îles Canaries à l’Égypte, elle est devenue un symbole de la culture amazighe, et kabyle en particulier, et a été intégrée dans le drapeau par des militants de ces régions.
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5. Géographie et environnement
Voici quelques informations que vous devez savoir sur la géographie et l’environnement de cette région :
- Relief et subdivisions : La Kabylie doit son surnom de Tamurt idurar, « le pays des montagnes », à son relief montagneux. La division principale sépare Grande et Petite Kabylies, marquée par les hauteurs du Djurdjura dans le sud et une ligne historique dans le nord.
- Climat : La Kabylie présente divers climats. Le littoral et la Kabylie maritime ont un climat méditerranéen, avec des hivers doux (15 °C en moyenne) et des étés rafraîchis par les vents marins (environ 35 °C). Les zones montagneuses sont plus rigoureuses en hiver, avec neige abondante, et les étés sont chauds et secs, surtout vers le sud. Les vallées intérieures ont des hivers similaires aux hauteurs, mais des étés très chauds, atteignant parfois 46 °C.
- Flore et faune : La Kabylie, avec ses variations topographiques et climatiques, abrite une diversité d’espèces, dont certaines sont endémiques. Elle héberge quatre des neuf parcs nationaux d’Algérie, dont le parc national du Djurdjura et le parc national de Gouraya, classés par l’UNESCO comme « réserves de biosphère mondiales ». La végétation méditerranéenne, représentée par le maquis et la forêt, est dominée par des essences variées, telles que le chêne vert, le cèdre de l’Atlas, l’érable, le pin noir, le pin d’Alep, et l’if, contribuant à faire des forêts kabyles parmi les plus riches de la région.
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6. L’architecture traditionnelle des maisons Kabyles
L’ancienne maison paysanne kabyle, appelée l’axxam, était un bâtiment rectangulaire d’une seule pièce, sans étage, où cohabitaient hommes et bétail. Les murs pignons et gouttereaux délimitaient une pièce d’environ sept mètres sur cinq. La façade abritait la porte, tandis que le gouttereau opposé était dédié au métier à tisser (azetta). Le toit était à deux versants, couvert de tuiles ou de terre bombée.
Les fondations consistaient en des tranchées remplies de grosses pierres et de mortier d’argile. Deux techniques de construction étaient utilisées pour les murs porteurs : pierres liées par du mortier de terre ou pisé avec un coffrage en bois.
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7. L’habit traditionnel kabyle
L’habit traditionnel kabyle remonte à des temps lointains. Il possède une histoire, relate un passé, reflète une richesse et abrite un trésor.
La robe kabyle :
Le costume traditionnel féminin kabyle comprend cinq éléments :
- La djebba kabyle, aussi appelée « Thaqandourth », est l’élément de base, avec un col à volants et des manches jaunes ou oranges. Des motifs brodés en zigzag et des dentelles kabyles colorées ornent la poitrine, inspirés de l’écriture kabyle.
- Un tablier, appelé « foudha » ou « fauta », décoré de rayures verticales multicolores.
- Une ceinture multicolore tressée, appelée « assarou » ou « agous ».
- La coiffe est un foulard carré, « TAFUNART » ou « TIMEHREMT », plié en triangle et noué sur la nuque.
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L’habillement traditionnel masculin :
- Le burnous (abidi) est un long manteau sans manches, enveloppant le corps avec un large capuchon carré et une bande de tissu aux pieds.
- Le pantalon des anciens (Tastawt) est une pièce en drap de coton ou de laine, avec deux pans séparés, resserrés devant et derrière, et des jambes étroites. Il est maintenu à la taille par un turban rayé et peut être recouvert d’une djellaba ou d’un burnous.
- La Taqeccabite, tissée d’une seule pièce avec capuchon et manches, remplace parfois le burnous. Elle est plus pratique pour les jeunes.
- La calotte (tacacit) et le turban (a3sseb) sont des coiffures traditionnelles.
- Les chaussures traditionnelles (arkasen) sont désormais en voie de disparition.
8. La cuisine Kabyle
La cuisine kabyle, tout comme de nombreuses cuisines traditionnelles, évoque l’image de la mère tamisant la semoule, préparant le couscous (seksou) ou pétrissant la galette. Ces souvenirs chaleureux restent ancrés dans la mémoire olfactive des enfants, qui ne comprennent pleinement leur valeur qu’à l’âge adulte, lorsque les parfums familiers s’estompent, laissant place à la nostalgie. Cependant, la cuisine kabyle offre également un goût brut, celui de la montagne, frais et épuré. C’est le goût d’un champ de blé après la moisson, celui des légumes, intrinsèquement bio.
Ifelfel s’zith : Il s’agit d’une salade kabyle de poivrons et de tomates assaisonnée à l’huile d’olive. Elle est généralement servie en entrée, chaude, tiède ou froide selon les préférences, accompagnée de la galette kabyle (aghroum akourane).
Amekfoul : Il s’agit d’un couscous kabyle aux légumes vapeur, très diététique et léger. Sans sauce ni viande, il est composé de légumes variés (macédoine) cuits à la vapeur, et agrémenté d’huile d’olive extra vierge. Un plat végétarien sain issu du terroir kabyle.
Berkoukes : Il s’agit d’un plat kabyle traditionnellement composé de pâtes en forme de boules (plombs), préparées à base de semoule roulée à la main, et accompagné d’une sauce rouge.
Tikourbabine : C’est un plat typique de la cuisine kabyle à base de semoule et d’une savoureuse sauce, avec ou sans viande.
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9. La musique Kabyle
L’achewiq est le genre musical traditionnel de la Kabylie. Le mot achwiq signifie « phrase » en kabyle, et il était autrefois réservé aux femmes pour exprimer des sentiments de joie ou de deuil. C’est un style « chanté » sans instruments, adoptant une forme mélodique. L’achewiq peut également être une joute poétique, abordant des thèmes à travers des métaphores ou des images. Il s’agit d’un échange entre les participants, avec des interrogations et des affirmations.
La musique kabyle contemporaine a principalement pris son essor au sein de la diaspora avec des chanteurs en exil tels que Cheikh El Hasnaoui, Slimane Azem, ou Cherif Kheddam, avant de s’enraciner en Algérie. Cette musique est caractérisée par une prédominance du chant, particulièrement féminin. Plusieurs voix féminines se sont distinguées dans ce registre, parmi lesquelles les chanteuses Hanifa, Nouara, Karima, et Malika Domrane.
Dans les années 1970, plusieurs groupes artistiques ont émergé, se réclamant de la musique moderne et s’associant à la chanson contestataire. Ces artistes ont introduit des instruments modernes tels que la guitare folk, classique, électrique, piano, etc. Certains artistes de cette époque ont également marqué la scène musicale kabyle par leurs revendications politiques et une ouverture artistique novatrice
Dans les années 1980, des chanteurs engagés ont marqué cette période avec des revendications politiques et identitaires, Matoub Lounès étant un exemple emblématique.
Aujourd’hui, la scène artistique kabyle est très diversifiée. On y trouve non seulement la chanson contestataire, mais aussi de la musique commerciale qui séduit un public jeune, ainsi que de la variété qui mêle romantisme, société et vie quotidienne.
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10. Le club phare de la Kabylie
La JSK (Jeunesse Sportive de Kabylie) est le club phare de la région, créé le 2 août 1946 et basé à Tizi-Ouzou. Ce club est une institution du football algérien, le seul à n’avoir jamais quitté l’élite (La première division) depuis qu’il y a accédé en 1969. Il détient le record de 14 titres de champions
La JSK a également gravé son nom dans l’histoire du football africain avec un palmarès impressionnant :
- 02 Ligue des champions
- 01 Coupe des Coupes
- 03 Coupe de la CAF
- 01 Supercoupe d’Afrique
Au-delà de ses succès sur le terrain, la JSK incarne bien plus qu’un simple club de football. Elle est le porte-étendard de la cause kabyle, symbolisant la fierté de la Kabylie, sa langue, et sa culture.
Très beau coin du Monde à visiter !